M. Guerroumi Membre du Conseil d’Administration . Association Islamique de l’Ouest de la France. Mosquée Assalam de Nantes.
M. Guerroumi
Membre du Conseil d’Administration . Association Islamique de l’Ouest de la France. Mosquée Assalam de Nantes.

Le Dr. Adnan Ibrahim, théologien musulman, médecin de profession et imam non salarié d’une mosquée de Vienne en Autriche, a lancé un court message dans un spot vidéo, lors de son passage à Paris en avril 2015.
C’est au cours d’une rencontre surprenante que le Dr. Adnan Ibrahim a diffusé un défi, qui inaugure et ambitionne la création du Forum mondial pour la réforme de l’islam, organisée par la fondation Al Kawakibi, du nom prestigieux d’un intellectuel musulman syrien, mort en 1902 au Caire, défenseur de la doctrine du panarabisme.

Quel est ce défi ?
S’adressant aux musulmans de France et d’Occident en général, le Dr. Adnan Ibrahim les adjure à être de bons et vertueux citoyens. Cependant, il serait honnête de rappeler ici qu’un tel appel n’a eu de cesse d’être martelé, depuis plus de vingt ans, par M. Tarik Ramadan controversé par les uns et adoubé par d’autres.

Voici qu’au moment où l’islamophobie prend des proportions inquiétantes en France, particulièrement depuis janvier 2015, mais aussi en Europe, des intellectuels musulmans projettent de créer ce Forum mondial de la réforme de l’islam. Nombreux, parmi les pratiquants chrétiens français, voient en cet évènement la naissance d’un protestantisme islamique, presque à l’image de la vision que portait, en son temps, le précurseur de l’opposition à l’autorité de l’église romaine, Martin Luther.

Ainsi, appeler les musulmans français à s’identifier en bons et vertueux citoyens, c’est tout de même méconnaître leur situation, leur conformisme spirituel spécifique, leur conservatisme religieux ou leur aspiration adaptative de leur culte à la modernité ou, à contrario, au maintien et au renfermement d’un droit musulman, loi islamique et jurisprudentielle, interprétatif du texte fondamental coranique figé et sclérosé depuis plus de neuf siècles.

Rien n’est moins compliqué dans cette approche sur l’étendue que représentent les difficultés inhérentes à l’idiome islamique en France, voire même ailleurs, dans plusieurs pays européens.

Néanmoins, ce n’est pas de cela qu’il s’agit car, comme les religions monothéistes précédentes, l’islam aura probablement droit à la nécessaire et salutaire toilette de rajeunissement à l’aune des décennies ou, sans doute, des siècles à venir. Non, le défi auquel le Dr. Ibrahim appelle se situe bien au-delà de ce projet de Forum mondial.

Il faut noter, de prime abord, cet aspect de distinction populaire selon lequel les musulmans français donneraient à penser qu’ils ne se soucient guère de leur appartenance à la citoyenneté française, de par la visibilité presque outrancière de leurs coutumes, de leur habillement, de leurs tendances pleines de désinvolture à vouloir imposer leurs cultures figurées d’ailleurs, la langue arabe pour les plus doués, oh les malotrus, un tel blasphème dans le coeur de la francophonie !

Non, tout cela est complètement ridicule, d’un côté comme de l’autre, tout dépend duquel on se place. Il y a tant de souffrance et d’incompréhension de part et d’autre, développées ou enrichies par les incompétences et les enjeux manipulatoires politiques.

La souffrance à laquelle il serait clair de se référer porte essentiellement sur cette manifestation d’exclusion multiple et variée, à cet ostracisme dont les descendants d’immigrés sont depuis fort longtemps les principales victimes.

L’incompréhension tient à cette définition affublée d’office aux musulmans français selon qu’ils seraient incapables de se considérer pleinement dans la citoyenneté de notre Nation.

Et pourtant, cette incompréhension et, par conséquent, cette souffrance du rejet proviennent essentiellement d’une même origine, l’appellation de : « communauté des musulmans de France ». Splendide, tout découle de ce grand art sémantique hypocrite et politique suprême !

Depuis les années 80, toutes les tendances politiques confondues, institutionnelles ou gouvernementales, ont persisté à maintenir cette absurde qualification des musulmans français, identifiée expressément et intrinsèquement aux vagues migrantes successives appelées à retourner, à court ou moyen terme, dans les pays d’origine.

Les générations sont passées, mais malgré cela, l’Etat français dans son ensemble, y compris tous les partis politiques de droite comme de gauche, insistent et persistent à instrumentaliser la population musulmane française en l’affublant de ce qualificatif ostracisant qu’est la « Communauté Musulmane de France », instiguant par là qu’il existerait, en France, un système communautaire, ou une frange de notre Nation prête à retourner d’où elle serait venue, d’une imaginaire contrée, une population qui dispose néanmoins de l’identité nationale mais qui ne serait résidente sur le territoire national que provisoirement.

D’où cette réaction disgracieuse des musulmans à vouloir se montrer plus visibles, non pas selon des critères sociologiques français, mais en marge de la société par des comportements ou des accoutrements complètement étrangers à la culture française. Ainsi, ces descendants d’immigrés, ces enfants de la France, ces citoyens français, ces patriotes expriment de la sorte leur déception, encourageant inconsciemment parfois cette recrudescence islamophobe par leur pathétique sentiment d’avoir été trompés, écartés de l’émargement national citoyen, trahis par ce pays qui est le leur et qui refuse, par leurre et ignorance à les reconnaitre comme citoyens français à part entière.

Alors, ils s’investissent sans y croire dans la toile partisane politique française. On trouve même des musulmans dans les rangs ou dans les contours du Front National. Certains ont cru au PS de Mitterrand, d’autres à l’UMP de Chirac, mais presque tous ont gardé un goût amer de leurs petites ou mesquines expériences politiques.

Mais à y réfléchir, ces « musulmans français de France » sont-ils plus musulmans que leurs ainés ? Sont-ils plus extrémistes, plus fondamentalistes ou plus radicalisés que leurs pères et mères invités en masses pour occuper les emplois que les petits bourgeois français rebutaient ?

Que nenni ! Ils sont français musulmans, pleinement citoyens, et non pas des musulmans de France liés, rattachés et/ou instrumentalisés intentionnellement par des pouvoirs politiques ou religieux étrangers, ou tels des sous-citoyens que l’on voudrait déporter dans des pays étrangers principalement arabo-afro-musulmans. Tant que la France les reniera et n’admettra pas leur vertueuse citoyenneté, les français musulmans accentueront leur visibilité dérangeante. Alors un sourire, car il faudra s’habituer à voir passer des caravanes de chameaux sur les voies rapides, ou des tentes bédouines entourées de troupeaux d’ovins sur les aires de campings de cette belle France chérie par tous.

Il s’agit bien sûr d’un jeu de dupes, auquel la conscience nationale en est l’otage. Nombreux sont les Nantais à avoir compris cette imposture, cette exclusion de la citoyenneté des Français musulmans.

Preuve en est cet accueil tellement chaleureux et émouvant, ce plaisir immensément partagé par ces français musulmans, qui se réjouissent de voir leurs concitoyens non musulmans venir visiter, périodiquement, leur mosquée Assalam de Nantes.

Alors, défi ou retour à la raison ? Là se situe l’esprit de la conscience citoyenne.

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عدنان إبراهيم

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